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L'investissement dans l'immobilier d'entreprise poursuit sa chute
Le 12 / 04 / 2023

IMMOBILIER

Les investisseurs sont à la fois plus attentistes et plus exigeants.

Les locaux doivent être adaptés aux nouvelles façons de travailler et aux contraintes environnementales.

 

 

Les chiffres sont sans appel. Au premier trimestre 2023, l'investissement dans l'immobilier d'entreprise - bureaux, commerces, locaux d'activité et entrepôts - a chuté de 35 % en France par rapport au premier trimestre 2022, à 3,3 milliards d'euros, selon les données d'Immostat. Soit un niveau inférieur de 40 % par rapport à la moyenne des cinq dernières années.

La baisse atteint 21 % pour l'Ile-de-France, à 2,4 milliards. Le coup de frein avait été encore plus net au quatrième trimestre 2022, avec un recul de 52 % des investissements en France et de 62 % en Ile-de-France.

Le segment des bureaux est concerné au premier chef. Ceux-ci, note JLL, « concentrent d'ordinaire [en région parisienne, NDLR] en moyenne 81 % des engagements. Ils terminent le trimestre sur une part de marché historiquement faible, pesant pour moins de la moitié des volumes avec à peine 1,2 milliard d'euros investis, soit -38 % sur un an».

 

Tendance de fond

Le décalage reste sensible entre les attentes des vendeurs - qui espèrent toujours céder leurs biens au plus haut - et celles des acquéreurs, qui empruntent plus cher avec la hausse des taux d'intérêt et attendent des baisses de tarifs. « L'attentisme perdure. Nous sommes toujours dans une période d'ajustement, pour intégrer un nouveau paradigme », décrypte CBRE dans un communiqué.

« Au fond, quel est le bon prix ? Le marché est un peu perdu », renchérit Stéphane Theuriau, responsable de l'immobilier chez BC Partners.

Mais pour lui, pas de doute, cette baisse des volumes d'investissement préfigure une baisse des prix.

Bien supérieure à ce qui est déjà observé. En Ile-de-France, par exemple, le tarif moyen des bureaux achetés a reculé de 5 % sur un an à fin mars, à 7.710 euros du mètre carré, selon Immostat.

 

 

Car aux difficultés passagères s'ajoutent des tendances de plus long terme. Avec le développement à grande échelle du télétravail dans les entreprises, celles-ci n'ont plus besoin d'autant de mètres carrés de bureaux. « On se retrouve en même temps avec moins de demande et une hausse du coût de financement », souligne Stéphane Theuriau.

Cela n'empêche pas BC Partners de continuer à investir dans le bureau. « Mais dernièrement, nous avons eu du mal à trouver des affaires. C'est-à-dire des immeubles bien situés, dont on pouvait réaliser une rénovation suffisamment en rupture avec le monde d'avant, et à un prix tenant compte du nouveau coût de la dette », expose-t-il.

La prudence est de mise

Car clairement, les investisseurs sont devenus beaucoup plus exigeants quant aux biens qu'ils souhaitent acquérir. « Les bureaux restent une classe d'actifs extrêmement intéressante, assure Aldo Mazzocco, le directeur général de Generali Real Estate, qui note quand même que la période incite à la prudence. Mais à condition qu'ils s'adaptent aux nouvelles façons de travailler et aux contraintes environnementales. » Sinon, « ils seront hors marché dans quelques années », poursuit-il. Autrement dit inlouables et invendables.

L'emplacement est aussi devenu encore plus essentiel avec le développement du travail à la maison.

Pour faire revenir les salariés au bureau, les entreprises recherchent plus que jamais des immeubles centraux, bien desservis par les transports en commun et dans des quartiers animés. « Nous basons nos investissements sur les meilleures localisations dans le Top 10 des villes européennes », poursuit Aldo

Mazzocco. 

Il note cependant que, cette année, son groupe investira moins dans de nouveaux immeubles pour se concentrer davantage sur la rénovation de ses bâtiments existants. Toujours pour répondre aux enjeux environnementaux.

Pour les immeubles ne cochant pas tous les critères indispensables aux yeux des acheteurs, l'avenir s'annonce sombre. « On va avoir au moins 10 millions de mètres carrés de bureaux en Ile-de-France qui vont être des zombies immobiliers », décrypte le responsable de BC Partners. Des opportunités de transformation de ces bureaux, notamment en logements, existent. Mais les freins restent nombreux.

 

La demande de bureaux à louer en Île-de-France baisse fortement 

La demande placée de bureaux en Ile-de-France (location et vente à l'occupant) a chuté de 39 % au premier trimestre 2023 par rapport à la même période de 2022, à 317.400 mètres carrés, selon Immostat. Les loyers faciaux (hors mesures d'accompagnement) sont pourtant toujours orientés à la hausse : +3 % sur un an pour les biens de seconde main et +2 % pour les biens neufs ou restructurés. Le stock de bureaux a lui mécaniquement gonflé. L'offre immédiatement disponible s'établit à 4,427 millions de mètres carrés en région parisienne (+8 % sur un an).

Artcile Les Echos, du jeudi 13 avril 2023