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Hausse de taux: face a l'inflation, la BCE persiste et signe
Le 05 / 02 / 2023

La Banque centrale européenne ne marque pas de pause dans sa lutte contre l'inflation. L'institution de Francfort a relevé ses taux directeurs de 50 points de base. Le taux de dépôt est passé à 2,5 %, le taux de refinancement à 3 % et celui de la facilité de prêt marginal à 3,25 %. Ils atteignent des niveaux inédits depuis novembre 2008. En juillet dernier, le taux de dépôt était encore en territoire négatif, à -0,5 %.

Une telle hausse est pas une sur-prise. La présidente de la BCE, Christine Lagarde avait prévenu qu'elle procéderait un relèvement de taux de cette ampleur pour février lors de la réunion de politique monétaire de décembre.

La banque centrale a récidivé, annonçant de façon quasi certaine un nouveau tour de vis de 50 points de base lors de sa prochaine réunion, qui se tiendra le 16 mars.

« Nous avons encore du chemin à parcourir » dans les hausses de taux, a prévenu la Française lors de sa conférence de presse.

Christine Lagarde a mis en avant la bonne tenue de l'économie européenne, qui « a mieux résisté qu'attendu et devrait s'améliorer au cours des prochains trimestres », et un marché du travail toujours en tension. Des facteurs qui pourraient gêner le recul de l'inflation. D'autant que l'inflation sous-jacente (hors énergie et alimentation) n'a pas diminué en janvier. La présidente de la BCE a bien insisté sur le fait que le ralentissement de la hausse des prix en janvier (8,5 % contre 9,2 % en décembre) était surtout dû à la baisse des coûts de l'énergie. Mais la Française a aussi reconnu que le risque inflationniste était moins élevé qu'auparavant. Et en annonçant qu'après mars la BCE adopterait une approche « réunion par réunion » et « en fonction des données disponibles », elle a ouvert la porte à un ralentissement du rythme, voire à une pause.

 

Surtout, il semble que les débats soient plus animés au sein du Conseil des gouverneurs, et que les colombes - qui préconisent une approche plus modérée de la politique monétaire - soient en train de regagner du terrain. « L'accent mis par Christine Lagarde sur la recherche d'un consensus serait cohérent avec une approche plus prudente au-delà de mars, à moins que l'inflation sous-jacente ne continue à surprendre à la hausse », analyse Frederik Ducrozet chez Pictet.

 

De fait, ce n'est qu'à partir de maintenant - au plus tôt - estiment les économistes, que l'on peut commencer à constater les effets du resserrement monétaire initié en juillet. Et la dernière étude réalisée par la BCE montre que les conditions de crédit se sont déjà fortement durcies en zone euro, rejoignant les niveaux de 2011.

 

Déjà soulagés par le discours moins dur que prévu de la Réserve fédérale américaine, les investisseurs ont en tout cas misé sur un futur assouplissement de la position de la Banque centrale. « Les acteurs de marché ont bien noté cette possibilité et ont abaissé leurs attentes du taux terminal de la BCE le niveau où elle arrêtera ses hausses, NDLR] à l'été de 15 points de base », souligne Jean Marc Delfieux chez Tikehau Capital. Ils l'évaluent désormais à 3,35 %. Dans la foulée de la conférence de presse dé Christine Lagarde, le rendement des obligations d'Etat européennes s'est fortement détendu. Le taux à 10 ans français a clôturé en baisse de 25 points de base, son équivalent allemand a reculé de 23 points de base, et le 10 ans italien de 40 points de base. Un optimisme jugé «hâtif», toutefois, par de nombreux analystes, dont ceux d'Aurel BGC ou d'ING.

 

Réinvestissements verts

L'autre point sur lequel la banque centrale était attendue ce jeudi était le dégonflement de son bilan.

Celui-ci approche les 9.000 milliards d'euros dont 5.000 milliards d'obligations acquises depuis 2015, pour soutenir l'économie face à d'importantes pressions déflationnistes - notamment lors de la crise du Covid. A compter de mars, elle réduira ainsi de 15 milliards d'euros par mois ses interventions sur le marché. Le montant de réinvestissement restant - en matière d'obligations souveraines - sera alloué pays par pays, en proportion des remboursements reçus. Pour les achats d'obligations d'entreprises, en revanche, la banque centrale a officialisé un changement des règles du jeu. Les réinvestissent seront orientés prioritairement « vers les émetteurs présentant de meilleures performances climatiques », explique la BCE.

Article Les Echos du vendredi 3 février 2023