Le gouverneur de la Banque de France estime que les marchés se sont un peu emballés dans leur prévision de hausse de taux.

Les marchés sont-ils allés un peu vite en besogne ? Vendredi dernier, les investisseurs ont fait bondir leurs prévisions d'évolution des taux de la Banque centrale européenne, voyant le taux de dépôt atteindre 3,75 % d'ici à l'automne. Un net relèvement, qui avait suivi à la fois des chiffres américains montrant que les pressions inflationnistes restaient vives outre-Atlantique, et des déclarations assez fortes de l'Allemande Isabel Schnabel sur la nécessité de poursuivre le resserrement monétaire.

C'est un retour de balancier brutal, après plusieurs semaines où les investisseurs tablaient sur une approche plus modérée de la BCE. Mais qui ne reflète pas forcément la réalité.

«Il y a eu un excès de volatilité sur les anticipations de taux terminal [le niveau où la BCE cessera de remonter ses taux directeurs, NDLR], confie aux « Echos »

François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France. Autrement dit, les marchés ont un peu surréagi depuis jeudi.»

Un niveau de taux qui ralentit l'économie

La BCE pourrait donc se montrer plus modérée dans le rythme de ses futurs tours de vis, comme l'avait déjà indiqué le banquier central dans un discours sur la politique monétaire, tenu vendredi devant le Centre des professions financières. « Nous ne serons en aucune manière obligés de relever les taux à chaque conseil des gouverneurs d'ici à septembre, avertit le gouverneur. Nous sommes déjà en territoire restrictif avec un taux de dépôt à 2,5 % et a fortiori quand il aura atteint 3 % en mars. » Cela veut dire que les taux ont dès à présent atteint un niveau où ils ralentissent l'économie.

Décision attendue avant la fin de l'été

La BCE entrera après mars dans une phase moins rapide, avec une attention toute particulière apportée aux données économiques. En ligne de mire, la stabilisation des taux directeurs. François Villeroy de Galhau plaide pour une approche pragmatique, qui permette de définir quels seront les événements qui emporteront la décision de la BCE d'arrêter ses hausses de taux dans un premier temps, puis, mais plus tard, d'entreprendre une baisse.

« La stabilisation devra à mon sens intervenir quand nous aurons un clair retournement de l'inflation sous-jacente la hausse des prix hors alimentation et énergie, NDLR]. L'exercice nécessitera une part de juge-ment, combinant données réelles et prévision », souligne le gouverneur. Celui-ci estime que la décision pourrait être prise avant la fin de l'été, voire plus tôt.

« Concernant l'inflation globale, nous sommes proches du pic, estime François Villeroy de Galhau. Pour l'inflation sous-jacente, ce n’est pas encore le cas. Mais elle augmente déjà moins vite. »

Artcile Les Echos, jeudi 23 février 2023